Le monde ne suffit pas
Laura Gozlan, Pauline Bastard, Brice Dellsperger, Bertrand Lamarche, Marie Reinert, Ferenc Gröf (Société Réaliste), Maxime Bondu, Niek Van de Steeg, Babi Badalov, Thomas Tudoux. Julien Prévieux.
“The only important elements in any society are the artistic and the criminal, because they alone, by questioning the society’s values, can force it to change.”  Samuel R Delany, Empire Star
La définition du monde inclut en elle même la question de sa circonscription et de sa limite. L’action de définir, renvoyant elle même à la détermination des limites d’un objet. Le monde en tant qu’objet peut alors se définir sous deux aspects essentiels.
En englobant les notions de réalité, d’altérité et de subjectivité, la définition de monde met en place une dimension incluante/excluante. Le monde est à la fois la surface sur laquelle on vit, l’ensemble de la réalité et des phénomènes  perçues, donc appréhendable matériellement par les sens et par la technologie, mais aussi le contexte social et politique déterminé dans lequel évolue l’individu.
Le monde se résume donc dans un sens à ce qui est extérieur à soit, tout en sachant que nous en faisons partie. Poser la question de la suffisance du monde renvoie à un double questionnement, potentiellement contradictoire, du fait de la nature globale et totale du monde. Suffire se définit comme un élément «  constituant en soi le facteur déterminant d’un contentement, ou à l’obtention d’un effet attendu ». L’objet satisfaisant doit constituer un élément tel qu’il est possible de s’en contenter sans qu’il soit besoin d’autre chose.
Hors le désir individuel, ne s’exprime a priori ni dans une démarche purement logique et rationnelle, ni dans le pragmatisme d’un cosmos ordonné.  Le désir n’a pas de limites et le monde en lui même constitue une tautologie néanmoins incomplète, entravant par sa propre définition la satisfaction : Le monde est une surface finie, et circonscrite répondant à des règles physiques, L’ego doit s’inscrire  et s’exprimer dans le cadre d’un contexte politique, moral et social déterminé. Le monde est restreint par la perception empirique et des sens, et difficilement appréhendable dans sa globalité par la raison.
Le désir comme la curiosité par sa nécessaire et impossible totale satisfaction, implique donc parfois un processus  de structuration, de fiction voire de Fantasme. A défaut de pouvoir interagir pleinement et directement dans le réel, s'impose la construction imaginaire consciente ou inconsciente et un processus de représentation. La représentation et l’image permettent depuis l’origine de produire des images « fausses » des simulacres ou des raccourcis de la réalité, permettant de l’appréhender ou de la cerner, voire de la transformer. Elle représente une forme de distanciation avec la réalité tangible et commune, qui comme la fiction met en place une construction qui n’a pas de modèle complet dans la réalité.
 « la science fiction traite de choses qui ne sont pas. La science fiction se limite à des possibilités compatibles avec la logique » Fredric Brown Elle procède de collages et de transformation du réel, d’invention de causalités permettant la mise en place d’une ontologie parallèle et potentielle en exploitant les procédés classiques du genre : novlangue, deus ex machina et planification, transformation d'échelle, démiurgie et totalitarisme, extrapolation temporelle, qui dans leurs tentatives d’affranchissement au réel proposant un ensemble des potentialités défiantes au pouvoir à l’autre et au monde.